Sept ans après la création de la spécialité d’infirmier en pratique avancée (IPA), seuls 300 exercent en ville. C’est ce que dénonce l’UFML-S ce 18 juillet, invitant à cesser le financement de cette profession pour « inefficacité » du dispositif, quitte à recentrer les enveloppes sur ce qui marche : la médecine libérale.
Le syndicat fonde son argumentaire sur l’audition du directeur général de la Cnam, Thomas Fatôme, interrogé ce printemps par la commission d’enquête des députés sur l’organisation du système de santé et les difficultés d’accès aux soins. « Il est vrai que le nombre d’ [IPA] reste faible, avait alors jugé le patron de la Cnam. Depuis 2019, un peu plus de 3 000 IPA ont été formés, dont l’hôpital a capté l’essentiel – ce qui n’est ni anormal, ni étonnant. On compte ainsi, dans le secteur libéral, un peu plus de 300 IPA pour 100 000 infirmiers en exercice. »
Un IPA libéral pour 233 000 Français
Rapporté aux 130 000 médecins libéraux, l’UFML-S compte 0,0023 IPA libéral par praticien. Preuve pour le syndicat du Dr Jérome Marty que le dispositif est « un échec, total, indubitable ».
Le syndicat trace également un parallèle entre les IPA et les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), sa bête noire, dont la « mission première était de trouver un médecin traitant à chaque patient qui n’en avait pas sur le territoire dont elles ont la charge ». Or, près de dix ans après leur création (en 2016) et 900 CPTS plus tard, « plus de sept millions de Français sont sans médecin traitant, un record historique », pointe l’UFML-S.
Sans détour, l’UFML-S appelle à « l’arrêt du financement » de ces deux dispositifs, de manière à économiser les « centaines de millions d’euros » dépensés chaque année « sans aucune amélioration de l’accès aux soins ».
Droit dans ses bottes, le Dr Marty assume vouloir transvaser ces fonds dans la poche des médecins, dont le report de certaines revalorisations conventionnelles à l’origine prévues au 1er juillet ne passe pas.
« D’un côté, on dépense des millions d’euros pour des solutions qui ne marchent pas, de l’autre, on ne finance pas le travail des médecins libéraux, ceux qui, de fait, assurent l’accès aux soins pour tous, affirme le Dr Marty. Les IPA en ville et les CPTS relèvent de fantasmes conçus in vitro par les esprits politiques. Sauf qu’in vivo, ça ne prend pas. »
Interrogé sur la responsabilité des médecins sur le faible nombre d’IPA en ville, pas toujours bien reçus par les généralistes installés, le président de l’UFML-S juge que cet « échec » n’est pas le fait du corps médical mais du dispositif : « Le modèle IPA est très bien pensé à l’hôpital, où les infirmières travaillent en équipe sur site. Mais en ville, les IPA sont mal rémunérées, elles ont trop de responsabilités et elles n’ont pas assez de temps pour tout gérer à différents endroits du territoire. Le système n’est pas bien pensé. Quand ça ne mord pas, autant arrêter ».
Modèle économique inadapté
Contacté par Le Quotidien, le vice-président de l’Union nationale des infirmiers en pratique avancée (Unipa), Jordan Jolys, trouve ce propos injuste. « Demandons-nous plutôt pourquoi y a-t-il 300 IPA en ville et pas plus », argumente-t-il, avançant lui aussi que le modèle économique n’est pas adapté. Selon une récente enquête de son syndicat, un IDE libéral qui deviendrait IPA libéral perdrait en moyenne 30 000 euros par an sur son chiffre d’affaires.
L’Unipa espère que des solutions seront trouvées dans le cadre des prochaines négociations conventionnelles avec la Cnam, dans la foulée de la loi sur le métier infirmier adoptée fin juin.
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